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71. Georges-Olivier Châteaureynaud, Le Gouffre des années (1987)

71. Georges-Olivier Châteaureynaud, Le Gouffre des années
(Le Héros blessé au bras, nouvelles, Paris, Grasset, 1987)

Un homme revient du futur pour accomplir ce qui n’avait pu être quand il était enfant pendant la guerre : mourir aux côtés de sa mère dans le bombardement qui avait détruit leur maison.

 

Le fantastique – 15 pages – **

Le voyage dans le temps : « Le cours des choses autrefois dévoyé va rentrer dans l’ordre. » (p.64)

« Dans le train, les voyageurs s’entretiennent à mots couverts de la dureté des temps. Une jeune fille, l’étoile jaune cousue sur la poitrine, lève un instant les yeux du patron de couturière qu’elle étudiait. Son vis-à-vis sort d’une sacoche usagée le dernier numéro de Signal et le lui déplie au nez. Elle baisse les yeux. Manoir observe par la fenêtre les rares autos, vieillottes et cependant presque neuves, qui circulent sur la route longeant la voie. Il aperçoit un convoi militaire. Il tressaille. Il consulte sa montre. Il se rassure. Il est encore tôt. La région ne sera bombardée qu’un peu plus tard dans la matinée. Loin d’ici, de jeunes hommes s’éveillent dans leur chambrée…Ou bien sont-ils sur pied, réunis en tenue de vol face à un tableau noir, autour de leur wing commander ? Ecoliers tôt levés de la mort et du feu. Ils ont vingt ans. Ils sont chaussés de bottes fourrées, casqués de cuir, vêtus de gros drap bleu et de peau de mouton. Ils boivent du thé et fument des cigarettes blondes. Les vœux de Manoir les accompagnent. Pourtant, dans quelques heures, l’un d’eux tuera sa mère. «  (p.51)

Publié dansUn tour du monde de la nouvelle du xxe siecle en 80 textes